Pliures causées par l'envoi postal.
Roland Barthes envoie cette lettre à René Wintzen à propos d'un article. Son interlocuteur est l'ancien rédacteur en chef de Documents, revue des questions allemandes qui dirige au moment de la rédaction de cette lettre les éditions et la revue Vent Debout et participe à l'hebdomadaire allemand Nouvelle de France. René Wintzen organise aussi des colloques sur la littérature. Les « 3 pages de [son] intervention » que Barthes évoque ici viennent d'un colloque de la même année où Barthes a traité des liens entre réalisme et littérature.
Barthes n'est alors encore qu'un jeune auteur. Il a publié son premier livre en 1953, Le Degré zéro de l'écriture, après avoir été intronisé dans le milieu littéraire par Maurice Nadeau. On voit dans cette lettre toute son humilité vis-à-vis de son travail : « il ne s'agissait que de thèses càd [sic] de propositions de caractère parlé, non développé, et non prouvé », il ajoute : « j'aurais pu vous donner la version française, mais elle ne fera pas le poids ». Barthes laisse aussi entrevoir une peur du jugement des lecteurs français : « je redoute moins l'audience allemande ». Pour l'auteur qui n'est qu'au début de sa carrière, il y a une volonté de ne réaliser que des publications de qualité, de ne pas laisser attacher à sa personne des écrits qui ne lui apportent pas une entière satisfaction et dont il souhaite qu'ils demeurent « anonymes ». On ressent en lisant ces mots l'insécurité de l'auteur qui disait à propos de la publication de son premier livre : « en tant que sujet producteur d'un objet offert publiquement au regard des autres, j'étais plutôt honteux. » (Roland Barthes par Roland Barthes).
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