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François René de CHATEAUBRIAND Discours prononcé à la chambre des Pairs. [discours de démission de Chateaubriand le 7 août 1830]

François René de CHATEAUBRIAND

Discours prononcé à la chambre des Pairs. [discours de démission de Chateaubriand le 7 août 1830]

Imprimerie de Marius Olive, Marseille 1830, 13,5x22cm, en feuilles.


Édition originale imprimée sur papier chiffon du célèbre dernier discours de Chateaubriand fait à la chambre des Pairs le 7 août 1830 et annonçant sa démission en réaction à la destitution de Charles X.
Si ce texte figure dès l’année suivante, avec d’autres discours, dans le tome Opinions et discours de ses Œuvres complètes, Chateaubriand retranscrira également l’intégralité de cette profession de foi dans ses Mémoires d’Outre-Tombe. Ainsi peut-on lire au chapitre 7 du Livre XXXI :
« Le 7 d’août est un jour mémorable pour moi ; c’est celui où j’ai eu le bonheur de terminer ma carrière politique comme je l’avais commencée ; bonheur assez rare aujourd’hui pour qu’on puisse s’en réjouir.
On avait apporté à la Chambre des pairs la déclaration de la Chambre des députés concernant la vacance du trône. J’allai m’asseoir à ma place dans le plus haut rang des fauteuils, en face du président. Les pairs me semblèrent à la fois affairés et abattus. Si quelques-uns portaient sur leur front l’orgueil de leur prochaine infidélité, d’autres y portaient la honte des remords qu’ils n’avaient pas le courage d’écouter. […] Je montai à la tribune. Un silence profond se fit […].. Hormis quelques pairs résolus à se retirer comme moi, personne n’osa lever les yeux à la hauteur de la tribune.
Je conserve mon discours parce qu’il résume ma vie, et que c’est mon premier titre à l’estime de l’avenir. »
à la suite de la retranscription de son discours, le mémorialiste conclue ainsi cet épisode tragique et glorieux :
« Ce discours eut quelque retentissement : tous les partis y étaient blessés, mais tous se taisaient, parce que j’avais placé auprès de grandes vérités un grand sacrifice. Je descendis de la tribune ; je sortis de la salle, je me rendis au vestiaire, je mis bas mon habit de pair, mon épée, mon chapeau à plumet ; j’en détachai la cocarde blanche, je la baisai, je la mis dans la petite poche du côté gauche de la redingote noire que je revêtis et que je croisai sur mon cœur. Mon domestique emporta la défroque de la pairie, et j’abandonnai, en secouant la poussière de mes pieds, ce palais des trahisons, où je ne rentrerai de ma vie. »
En 1842 Louis Blanc, dans son Histoire de dix ans, reviendra sur cet événement et commentera l’intervention de Chateaubriand en ces termes :
« Ainsi, en moins de sept heures, 219 députés […], avaient modifié la constitution, prononcé la déchéance d’une dynastie, érigé une dynastie nouvelle. […] On s’était si avidement emparé du prétexte de la nécessité présente et de la raison d’état, qu’on n’avait songé à la chambre des pairs que pour lui faire une sorte de communication qui ressemblait plus à un acte volontaire de convenance qu’à une formalité indispensable. […]. La pairie ne s’étant formée que de toutes les défections éclatantes dont trente ans de secousses politiques avaient fourni l’occasion et donné au monde le scandale, on l’avait jugée toute prête pour une nouvelle servitude.
Mais il y avait alors, parmi les pairs, un homme dont on connaissait, au Palais-Royal, la loyauté chevaleresque et l’âme fidèle. Le bruit avait couru que M. de Chateaubriand préparait un discours accusateur et terrible qu’il allait y donner, envers tous, l’exemple du courage, protester une dernière fois pour la monarchie vaincue, dénoncer enfin les amis qui l’avaient égarée et les parents qui l’avaient trahie.
Cette nouvelle était parvenue au Palais-Royal, où elle avait jeté la plus grande inquiétude. Il fallait à tout prix conjurer un pareil danger. Mme Adélaïde fit savoir à M. François Arago que le duc d’Orléans désirait avoir avec lui un entretien secret. M. Arago ne put parvenir jusqu’au prince, soit par l’effet de circonstances fortuites, soit que le duc d’Orléans craignit de se compromettre personnellement dans une négociation aussi délicate. Mme Adélaïde […] vit M. Arago et lui déclara qu’en lui saurait un gré infini d’aller trouver M. de Chateaubriand pour le supplier de renoncer à son discours. à cette condition, M. de Chateaubriand était assure d’avoir sa place dans lie ministère. M. Arago se rendit chez l’illustre poète. Il lui exposa que la France venait d’être remuée dans ses profondeurs ; qu’il importait de ne la point livrer aux hasards des réactions trop promptes ; que le duc d’Orléans, devenu roi, pouvait beaucoup pour les libertés publiques, et qu’il était digne d’un homme tel que le vicomte de Chateaubriand de ne pas se faire, au début d’un règne, l’orateur des agitations. Il finit en disant qu’un meilleur moyen s’offrait à lui de servir utilement son pays, et qu’on n’hésiterait pas à lui donner un portefeuille, celui de l’instruction publique, par exemple. Chateaubriand secoua tristement la tête. Il répondit que de tout ce qu’il venait d’entendre, ce qui touchait le plus son cœur, c’était l’intérêt de la France si profondément troublée ; qu’il n’attendait rien et ne voulait rien accepter d’un régime élevé sur la ruine de ses espérances ; mais que, puisque son discours pouvait jeter dans son pays des semences de haine, il en adoucirait les formes. Cette négociation singulière avait lieu la veille du 7 août.
Le lendemain, la chambre des pairs s’étant rassemblée à neuf heures et demie du soir, le président lut la déclaration de la chambre des députés, après quoi le vicomte de Chateaubriand se leva et s’exprima en ces termes au milieu du plus profond silence : ‘‘Messieurs, la déclaration apportée à cette chambre est beaucoup moins compliquée pour moi que pour ceux de MM. les pairs qui professent une opinion différente de la mienne. Un fait, dans cette déclaration, domine, à mes yeux, tous les autres, ou plutôt les détruit. Si nous étions dans un ordre de choses régulier, j’examinerais sans doute avec soin les changements qu’on prétend opérer dans la charte. Plusieurs de ces changements ont été par moi-même proposés. Je m’étonne seulement qu’on ait pu entretenir la chambre de cette mesure réactionnaire, touchant les pairs de la création de Charles X [Ndr : l’ordonnance prévoyait l’annulation des nominations de pairs faites par Charles X]. Je ne suis pas suspect de faiblesse pour les fournées, et vous savez que j’en ai combattu même la menace, mais nous rendre les juges de nos collègues, mais rayer du tableau des pairs qui l’on voudra, toutes les fois qu’on sera le plus fort, cela ressemble trop à la proscription. Veut-on détruire la pairie ? Soit. Mieux vaut perdre la vie que la demander.’’
Après ces paroles qui faisaient honte à l’assemblée de sa patience dans l’abaissement, l’orateur cherche quelle forme de gouvernement est désormais applicable à la France. La république ne lui paraît pas possible ; mais la monarchie l’est-elle aux conditions qu’on lui fait ? ‘‘La monarchie, s’écrie-t-il, sera débordée et emportée par le torrent des lois démocratiques, ou le monarque par le mouvement des factions.’’
Avant de passer à la solution la meilleure, selon lui, du problème formidable posé devant la France, M. de Chateaubriand rend hommage à l’héroïsme du peuple de Paris.
‘‘Jamais, dit-il, défense ne fut plus juste, plus héroïque que celle du peuple de Paris. Il ne s’est point soulevé contre la loi, mais pour la loi ; tant qu’on a respecté le pacte social, le peuple est demeuré paisible. Mais lorsqu’après avoir menti jusqu’à la dernière heure, on a tout à coup sonné la servitude ; quand la conspiration de la bêtise et de l’hypocrisie a soudainement éclaté ; quand une terreur de château organisée par des eunuques, a cru pouvoir remplacer la terreur de la république et le joug de fer de l’Empire, alors ce peuple s’est armé de son intelligence, et de son courage. Il s’est trouvé que ces boutiquiers respiraient assez facilement la fumée de la poudre, et qu’il fallait plus de quatre soldats et un caporal pour les réduire. Un siècle n’aurait pas autant mûri un peuple que les trois derniers soleils qui viennent de briller sur la France.’’
Faisant sur lui-même un retour amer : ‘‘Inutile Cassandre, s’écrie-t-il, j’ai assez fatigué le trône et la pairie de mes avertissements dédaignés. Il ne me reste qu’à m’asseoir sur les débris d’un naufrage que j’ai tant de fois prédit. Je reconnais au malheur toutes les sortes de puissances, excepté celle de me délier de mes serments de fidélité. Je dois aussi rendre ma vie uniforme. Après tout ce que j’ai fait, dit et écrit pour les Bourbons, je serais le dernier des misérables si je les reniais au moment où, pour la troisième et dernière fois, ils s’acheminent vers l’exil.’’
Enfin, après avoir foudroyé la lâcheté de tous ces ardents royalistes qui, par leurs exploits projetés, ont fait chasser les descendants de Henri IV à coups de fourches, et qu’il montre accroupis maintenant sous la cocarde tricolore : ‘‘Quelles que soient, dit-il, en terminant, les destinées qui attendent M. le lieutenant-général, je ne serai jamais son ennemi s’il fait le bonheur de ma patrie. Je ne demande à conserver que la liberté de ma conscience et le droit d’aller mourir partout où je trouverai indépendance et repos.’’ »
 

VENDU

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